Forêt d’Estremont, Bay et voies romaines
Forêt d’Estremont, Bay et voies romaines
Situation particulière du village de Bay et son toponyme
Le village de Bay, qui jouxte la forêt et couvre en partie son territoire, a pu autrefois s’identifier à elle, puisqu’on le voit, au Moyen-Âge, s’appeler Monbay, rappelant ainsi le relief en dôme du massif. Il fut sans doute, à l’époque romaine, lieu d’étape et d’approvisionnement pour le nœud routier voisin ; il est lui-même carrefour important et plusieurs sentiers le relient à la frontière départementale de l’Aisne qu’est le Haut-Chemin.
Son toponyme ne serait-il pas lié à cette situation ? Pour M. Tamine, Bay rappelle sans nul doute “le ruisseau” ce qui peut se concevoir puisque l’une des sources de la Serre se trouve au Moulin de Bay, et que le ru auquel elle donne naissance est limite de la forêt d’Estremont et de celle du département.
Pourtant le toponyme de Bay pourrait être également rapproché du verbe bayer, béer : selon le Larousse de la langue française, il vient du latin populaire “batare”, onomatopée d’un « parler fort » ; il aurait pu convenir parfaitement aux échanges sonores d’un marché de frontière, et le mot de “babaye” est toujours utilisé dans les villages avoisinants pour désigner une commère ou une personne vêtue de façon originale. Il aurait pu aussi, comme le verbe bayer, signifier l’ouverture, tant pour sa proximité avec le nœud routier d’Estremont que pour sa position-frontière entre la Thiérache ardennaise et celle de l’Aisne.
Quoiqu’il en soit, il dut avoir une certaine notoriété pour être annoncé depuis plusieurs lieues et bien avant le carrefour d’Aouste, par un toponyme aux mêmes résonances : Estrebay = route de Bay. Rappelons au passage ceux de la Haute-Borne, Estremont, Aouste (Auguste), la Férée, le Haut-Chemin, Macquenoise etc. qui évoquent bien l’empreinte gallo-romaine.
Confluent des 2 bras de la Serre |
Ainsi que nous l’avons vu ci dessus, la forêt d’Estremont est enserrée entre les deux bras de la Serre et toutes les voies qui la quittent devaient emprunter un gué, sauf l’allée centrale N-E qui, se dirigeant vers Aouste, en sort à la Haute-Borne, entre les deux sources. |
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- Gué de Ribeauville qui assurait la desserte de la forêt d’Estremont au sud de la Serre. Venu du carrefour des Six routes, il traversait dans le hameau de Ribeauville un nouveau croisement, empruntait la rue de la Mère Thilde et rejoignait, au premier coude de cette route, un vieux chemin que la tradition locale nomme toujours « voie romaine ». Il arrivait à Mainbressy en longeant par les Rayères la cuvette de Mainbresson et des rangées de grands arbres marquent encore son passage. Il rejoignait à la Croix-Bellotte le chemin de Vaux et prenait la direction de Fraillicourt et de Nizy-le-comte. Deux autres voies importantes l’ont croisé au carrefour de Ribeauville : - le chemin de Château-Porcien à Macquenoise (voir chapitre des chemins de Macquenoise) - le chemin de Rozoy à la Viotte et la Férée (toponymes routiers) qui longe la forêt au sud de la Serre et peut se mesurer en lieues gallo-romaines de 2222 mètres, datant ainsi l’ensemble du réseau ; ces étapes sont facilement repérables sur la carte IGN au 1/25000e : • carrefour de Ribeauville, • croisement avec la D14 à Mainbresson, • croisement à Raillimont avec le vieux chemin de Fraillicourt, • croisement au centre de Rozoy. - Gué de Thierry-Pré qui laisse passage à une allée rectiligne NO-SE, traversant la forêt en son point culminant (260m) et rejoignant, à ½ km au sud, l’ancienne voie Laon-Castrice. - Quant au Chemin d'Aouste évoqué ci-dessus qui, après la Haute-Borne, prolongeait au Nord Est l'allée centrale, son dessin reste bien marqué sur les cartes IGN jusque les Hautes-Bruyères. A partir de là, les nombreuses sources de la Serre ont rendu son tracé difficile, ce qui pourrait motiver d'au moins deux voies pour gagner Aouste : • L'une par la ferme du Bois de Soissons, la Reupette et le Caillotis; • L'autre par la Demoiselle et la Queue de Morue, en longeant le Bois de la Fère et le hameau de la Hérissonnerie. Ces deux chemins existent bien sur les anciennes cartes d'E-M. |
Le village de Bay connut des sorts divers : s’il eut sa période faste aux temps des Romains, on le retrouve en 1100, sous le nom de Monbaye, propriété de l’abbaye Saint-Nicaise de Reims et bénéficiant, par convention avec le seigneur de Rumigny, d’une des premières chartes de commune de la région Nord, sous la coutume de Vervins. Il passa au XVe siècle à la famille de Lorraine, puis à celle de Luxembourg, et la Guerre de 100 ans le vit devenir repaire de brigands. |
Vue générale de la forêt d'Estremont |